Le rendez-vous du mois

Olivier Schneider

Olivier Schneider, 41 ans, Brestois, préside la FUB depuis 8 ans. Convaincu du rôle que le vélo peut jouer dans les transitions, cet informaticien de formation est inséparable de sa marinière et de son vélo pliable Brompton, sauf quand il se déplace en tandem, adapté au handicap de sa femme.

 

Créée il y une quarantaine d’années, la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) est maintenant présente sur tout le territoire français et regroupe plus de 500 associations et antennes promouvant le vélo au quotidien. La FUB, finalement, c’est pour qui, et pourquoi ?

La FUB est une association d’intérêt général. Son objectif est de permettre à toutes et tous, partout sur le territoire, de circuler à vélo pour leurs activités quotidiennes en réunissant les conditions de sécurité et de confort nécessaires pour prendre plaisir à se déplacer autrement qu’en voiture individuelle. Nous défendons le droit à une ville cyclable et œuvrons à l’amélioration du cadre légal et réglementaire, à l’enrichissement du débat public par l’expertise de nos membres et à la promotion d’une vision émancipatrice de la mobilité pour répondre aux impératifs de transition écologique, de justice sociale et d’implication citoyenne.

La France arbore fièrement la plus grande compétition cycliste au monde, mais quand on sait que la moitié des déplacements en voiture font moins de 5 km, on peut se demander si les Français ont vraiment la culture du vélo ?

Les Françaises et les Français aiment viscéralement le vélo : c’est leur activité physique préférée. Nous sommes l’un des pays avec le taux d’équipement des ménages en vélos le plus élevé au monde. Il se vend d’ailleurs chaque année plus de vélo que de voitures. Mais créer une culture du vélo comme mode de déplacement de tous les jours ne se décrète pas. Faire renaître l’image d’un vélo populaire prend et prendra du temps, tant nos imaginaires ont été construits autour de la voiture individuelle. Les grands événements sportifs comme le Tour de France contribuent à la visibilité du vélo, mais c’est une vision partielle : celle d’une pratique sportive de haute intensité. Pour que nous retrouvions une culture du vélo, il nous faut investir l’éducation dès le plus jeune âge, accompagner au changement de pratique tout au long de la vie, promouvoir une vision positive du vélo tout en combattant les représentations mensongères véhiculées par le lobby automobile.

Début mai, le gouvernement a annoncé qu’il allait débloquer 2 milliards d’euros sur les quatre prochaines années dans le cadre du plan Vélo et mobilités. Peut-on espérer de vraies pistes cyclables et espaces de sécurité, qui manquent souvent et peuvent décourager des gens à enfourcher leur vélo ?

Le gouvernement a entendu, en partie, la revendication première du mouvement vélo : mettre les moyens pour transformer nos routes et créer des réseaux d’infrastructures cyclables sécurisées et confortables. Sans ces financements d’État, le plan Vélo du gouvernement aurait été caduc alors que nos voisins européens débloquent des financements très importants pour mobiliser pleinement le potentiel du vélo dans l’atteinte de la neutralité carbone.

Maintenant, les collectivités locales doivent être tout entières tournées vers l’action : car ce sont elles qui, in fine, doivent conduire les travaux pour créer des réseaux de pistes cyclables. On sent une mobilisation croissante de leur part. Mais cela n’est pas vrai partout et surtout, nous voyons encore trop de collectivités enfreindre la loi et ne pas créer d’aménagements prévus par la loi qui sécurisent les cyclistes. Les associations membres de notre réseau jouent un rôle de vigie essentiel !

À ce jour, de quelles aides gouvernementales un citoyen peut-il disposer pour s’acheter un vélo ?

Pour s’acheter un vélo, il existe deux dispositifs d’aides. Le bonus écologique, connu comme l’aide à l’achat de vélos, qu’ils soient mécaniques, à assistance électrique, cargo, et désormais neufs ou d’occasion. Cette aide est accessible à 50 % des ménages et son montant varie selon les revenus du ménage et le type de vélo acheté.

On peut sinon bénéficier de la prime à la conversion, donc à condition de mettre un vieux véhicule au rebut. Le montant varie cette fois encore selon les revenus et les capacités : une personne porteuse de handicap peut ainsi bénéficier d’une aide jusqu’à 3 000 € pour l’acquisition d’un tricycle par exemple.

Quelle que soit l’aide retenue, celle-ci est cumulable avec les autres aides versées par les collectivités elles-mêmes (régions, départements, agglomérations ou communes). L’accès à l’information n’est pas toujours évident pour les usagers et usagères. Aussi, un militant a mis en place une plateforme que promeut le ministère de la Transition écologique : mesaidesvelo.fr.

L’observatoire de la FUB estime à environ 90 % la proportion de femmes parmi les apprentis cyclistes. Pourquoi la pratique du vélo obéit-elle aussi à des normes de genre ?

Analyser le différentiel de pratiques du vélo selon le genre est un champ de recherche qui se développe. Nous-mêmes, à la FUB, animons un travail de recherche et d’actions sur l’égalité femmes-hommes au travers d’un groupe d’actions. La FUB s’appuie par exemple sur son réseau de vélo-écoles pour observer les profils de personnes participant aux sessions d’apprentissage de la mobilité à vélo. Ainsi, si 80 % de ces personnes sont des femmes, une majorité de formateurs sont des hommes. Ces inégalités traduisent l’existence de freins qu’il s’agit d’identifier collectivement pour tâcher de les lever.

Plus globalement, on note que les femmes sont sous-représentées parmi les usagers et usagères du vélo. Leurs besoins sont identiques au reste de la population : davantage d’itinéraires sécurisés, maîtrise de la vitesse des véhicules motorisés, respect des distances de dépassement. Mais la répartition genrée des tâches, notamment liées au travail domestique et à l’accompagnement des proches, complexifie les pratiques de mobilité des femmes. Contraintes de parcourir de multiples déplacements de courtes et moyennes distances, elles rencontrent plus de freins au changement de pratiques de mobilités.

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Olivier Schneider

infos : www.fub.fr