tendance maison : les dérives de la fast-déco
Entre 2017 et 2022, le nombre d’éléments d’ameublement mis sur le marché en France a augmenté de 88 %, passant de 269 à 505 millions d’unités mises sur le marché. Le nombre de déchets d’éléments d’ameublement (DEA) collectés a quant à lui été multiplié par un peu plus de 2 entre 2014 et 2020, selon l’Ademe.
« Depuis les confinements liés au Covid, la maison a été surinvestie par ses habitant·es : lieu d’enfermement subi, mais aussi espace refuge, elle a été transformée et personnalisée de façon encore plus forte qu’auparavant », analyse Pauline Debrabandere, coordinatrice de campagnes de Zero Waste France.
Au-delà des quantités astronomiques de meubles et d’éléments de décoration mis sur le marché, d’autres facteurs attestent de l’émergence d’un système de fast-déco reposant sur les mêmes pratiques que la fast-fashion : renouvellement rapide des collections, conditions de travail parfois contraires à la dignité humaine, dumping environnemental et social, prix très bas et promotions permanentes, utilisation des réseaux sociaux et « gamification »…
Aujourd’hui, une enseigne milieu de gamme comme Maisons du Monde commercialise chaque année 3 000 nouvelles références, parmi les 15 000 proposées. De nouveaux acteurs, comme Shein et Action, ont fait irruption sur le marché de la déco low-cost, en s’appuyant sur des communautés très actives sur les réseaux sociaux, friandes de « hauls » et d’ « unboxing ». Résultat : 46 % des acheteur·ses de produits de décoration renouvellent au moins une fois par an des éléments de leur pièce à vivre.
Il existe des alternatives efficaces pour limiter l’impact des meubles et de la décoration, comme le réemploi et la réparation. Selon une estimation de RREUSE, réseau européen des entreprises sociales du réemploi, les activités de ses membres ont permis en 2022 de détourner environ 1 million de tonnes de marchandises et de matériaux de sites d’enfouissement où ils auraient dû finir leur vie, et d’étendre la durée de vie d’environ 214 500 tonnes d’objets grâce au réemploi. Cette activité compense ainsi chaque année les émissions annuelles de CO2 de plus de 108 000 citoyen·nes européen·nes.
Mais bien que le réemploi et la réparation soient légalement prioritaires sur le recyclage et l’incinération, ces activités restent marginales. Par exemple, le taux de meubles réemployés, parmi ceux collectés par les éco-organismes, est en baisse constante depuis 2017 et n’a jamais dépassé 3 %.