tribune - corrida : le temps est venu d’en finir…

Culture, culture et reculture. Les amateurs de corrida martèlent ce terme à l’envi, comme s’ils voulaient se persuader que leur passion est grande et légitime. Il n’en est rien, comme en témoignent les attendus du tribunal judicaire de Nîmes qui qualifie la corrida d’ « actes de cruauté envers les taureaux, les sévices étant accomplis intentionnellement dans le but de provoquer la souffrance ou la mort de l’animal ». La ministre de la Culture avait d’ailleurs fait comprendre à l’ex-députée Françoise Dumas que la corrida n’a rien d’un « spectacle vivant » et le ministre du Budget affirme : « les toreros ne sont pas considérés comme des artistes, dès lors que leurs prestations ne concourent pas à des représentations d’une œuvre de l’esprit ». Comme autre justification, les aficionados avancent que le taureau est élevé pour combattre et mourir dans l’arène où il trouvera honneur et gloire, contrairement à la condition des bêtes d’abattoirs. Horrifiés par leur sort, comment ne le sont-ils pas face à un animal supplicié sous leurs yeux pendant 15 minutes ? Justifier un élevage spécifique à seule fin d’en voir les animaux mis à mort en public, eussent-ils vécu libres jusqu’au jour de leur calvaire, manque, dès lors, cruellement de fondement. Quand la culture ou l’écologie ne suffisent plus, ils en appellent à la tradition. Or, la corrida n’a rien d’une tradition française. Elle a été importée d’Espagne et sa mise en place a connu beaucoup d’aléas jusqu’en 1891. Si l’importance de la tradition n’est pas contestable, elle cesse d’être respectable et doit être combattue dès l’instant où elle ne correspond plus à l’évolution des mœurs résultant du progrès de la civilisation. Les exécutions publiques, les châtiments corporels, le bizutage ont fait partie de nos traditions. Qui songerait à se plaindre de leur disparition ? Au même titre que l’amalgame systématique entre corrida et feria, l’argument économique ne tient pas non plus Si la première se trouve être le prétexte de la seconde, il n’y a aucune raison pour qu’elle en demeure le support obligé. Le succès des Jeux romains, des courses camarguaises et des concerts, à Nîmes, en est une illustration saisissante. Pour les Vendanges, la capitale de la tauromachie a donné six corridas en 2021, mais plus que quatre en 2022 ! Voilà qui mérite réflexion. Et, quand les aficionados attendent 2 000 personnes, mais que le rassemblement protestataire n’en compte que 800, alors même qu’à quelques mètres de là les spectateurs entrent dans les arènes, on peut légitimement se poser la question quant à l’attachement des habitants aux corridas. Enfin, un sondage IFOP Alliance Anticorrida de 2017 démontre, qu’en dépit de la pression sociale, les anticorridas sont devenus majoritaires : 54 % des Nîmois sont « défavorables aux corridas avec pique, banderilles et mise à mort des taureaux ». Et, dans les départements dits « de tradition taurine » ; 75 % des sondés plébiscitent l’abolition des corridas. Pourtant, une minorité influente d’élus et de notables s’acharne à défendre l’indéfendable. S’ils prenaient la peine d’engager une vraie réflexion sur le sujet, ils constateraient que l’immense majorité des Européens n’éprouve qu’un sentiment de dégoût, voire de franche hostilité envers la corrida. À cet égard, les touristes ne sauraient faire illusion. La curiosité pour les coutumes locales les incite à y assister mais la plupart d’entre eux s’en retournent écœurés, se promettant de ne jamais y revenir… De Claire Starozinski, présidente de l’Alliance Anticorrida.

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