inutile ! - la loi contre l’accaparement des terres censurée par les Sages

La volonté des parlementaires d’élargir le droit de préemption des Safer (sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural) sur les parts de société vient d’être stoppée par l’arrêt du Conseil constitutionnel du 17 mars 2017, censurant les articles 1 et 3 de la loi relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles. Les Sages ont jugé que le maintien du contrôle du marché foncier serait attentatoire à la propriété privée et à la liberté d’entreprendre. L’ONG Terre de liens appelle à ce que tous les moyens légaux soient mis en œuvre pour que le marché foncier agricole reste régulé en France.

La loi en question, votée en février dernier, était certes complexe à mettre en œuvre. Elle permettait néanmoins de compliquer le contournement des Safer. Depuis 1962, les Safer régulent le marché foncier. Bien que souvent attaqué, le droit de préemption des Safer n’a jamais été supprimé, ni jugé anticonstitutionnel en regard du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre. La sociétarisation et la financiarisation de l’activité agricole empêchent aujourd’hui les Safer de remplir leurs missions. Terre de liens ne comprend pas en quoi rétablir le pouvoir de régulation des Safer serait contraire à la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.

Le Conseil constitutionnel a mis le doigt sur une des faiblesses techniques de cette loi : les Safer préemptant une cession partielle de parts de société, elles ne prennent pas le contrôle de ladite société. Néanmoins, les Sages ont oublié d’aller au bout du raisonnement. En effet, la possibilité pour les Safer d’imposer un statut quo dans la gouvernance des sociétés, même sans en gagner le contrôle, permettrait de faire échouer l’opération de contournement du contrôle du marché foncier. Car c’est bien ce contournement qui était visé par la loi. Dans les faits, un tel droit aurait eu avant tout un pouvoir dissuasif, les préemptions des parts de société auraient été en nombre très limité.

En l’état, poursuivre le vote de textes élargissant le droit de préemption des Safer sur les parts de société semble inutile. Néanmoins, Terre de liens invite les parlementaires, les juristes, les syndicats agricoles, la société civile et bien sûr les Safer à faire preuve d’imagination pour proposer des mesures en état de maintenir l’effectivité de la régulation du marché foncier agricole. L’article L.101-1 du Code de l’urbanisme affirme que « le territoire français est le patrimoine commun de la nation ». Il convient que la nation se dote des outils permettant de préserver ce patrimoine commun !

Terre de Liens rappelle que la transition vers une agriculture française respectueuse des équilibres sociaux, territoriaux et environnementaux ne peut avoir lieu que si le marché foncier agricole est régulé et sa financiarisation stoppée.

Terre de liens

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